Après cette rapide mise au point, il sortit téléphoner. On le vit tourner sur lui-même avec des gestes
irrités de sa main libre puis il rentra, les sourcils froncés. Il grommela qu'ils seraient là dans une petite
heure et ajouta : « Je me demande si celle qu'on cherche n'avait pas raison dans son antipathie pour son
gendre... »
Lui, qui prenait toujours la parole sans s'étonner du silence de son compagnon commençait à s'adoucir ;
il perdait de sa superbe depuis qu'ils avaient été rabroués au bistrot et surtout il commençait à s'émouvoir
voire à s'amuser du sort de ce couple de circonstances. Au cours de leur promenade pour occuper leur
attente, il céda, à la grande surprise de l'autre, à une digression pseudo-poétique : « Tu sais que ce jour-là,
celui de la disparition, le temps épouvantable n'a duré que cinq heures... le temps de favoriser leur
rencontre puis leur escapade. Le froid et la neige ont fixé les gens chez eux, bouché l'horizon, rendu le
monde illisible mais ça n'a pas été jusqu'à bloquer les trains et la circulation routière n'était que ralentie...
Et puis, le mauvais temps s'est arrêté brutalement en fin de journée. Le lendemain, il paraît que toute la
neige tombée la veille avait disparu à midi... Étrange, non ? » Le jeune enquêteur ne répondit pas mais il
évoluait lui aussi, dans le regard qu'il portait sur son patron. Il se surprit à lui sourire lorsqu'il sentit une
main se poser sur son épaule en lui suggérant avec douceur de faire demi-tour pour revenir vers le bistrot.
A défaut d'une amitié naissante, une connivence s'établissait.
Le couple grenoblois arriva un peu plus tard. Ils descendirent d'un gros 4X4 rutilant, lui avec sa coiffure
de footballeur et son pantalon étroit, elle, plus discrète, menue, très brune avec à l'évidence les yeux de sa
mère. Le mari attaqua sans préambule :
— « Alors, belle-maman s'est trouvé un mec ? Et on doit payer pour ça ? »
— « Nous avons fait notre travail, nous avons retrouvé sa trace et oui, vous allez nous payer pour
« ça » conformément au contrat que vous avez signé. Madame en apprendra un peu plus auprès
des patrons du café», dit le jeune enquêteur, martelant ses mots et prenant la parole pour la
première fois de la journée, sous le regard amusé de son mentor.
La jeune femme se dirigea vers le comptoir, sortit de son sac quelques documents avec des photos ; les
langues se délièrent. Elle apprit que sa mère, en compagnie d'un « homme d'un certain âge, habillé
comme en ville », s'était assise avec lui. Ils avaient mangé en parlant beaucoup et riant souvent. À la fin
du repas, ils s'étaient tournés vers un client qui se levait pour partir. « le monsieur au manteau gris a payé
par carte sans regarder la note » puis tous les trois s'étaient dirigés vers la sortie et alors que la porte
s'ouvrait, la serveuse avait entendu : « On roulera pas vite mais vous aurez votre correspondance». Le trio
était vite devenu invisible « vu qu'on n'y voyait pas à deux mètres ».
Elle revint vers les trois hommes et s'adressa d'un ton ferme aux enquêteurs : « je vous remercie pour ce
que vous avez fait. S'ils voulaient une correspondance, ils sont donc allés soit à Grenoble soit à Veynes...
mais nous arrêtons les recherches, inutile de poursuivre. Vous serez bien sûr payés dès réception de votre
facture. » Se tournant vers son mari, dans un registre nettement plus sec, elle ajouta : « ma mère est partie
vers autre chose, elle a fait un choix, je le respecte, je me demande même si je ne l'admire pas un peu...
En tout cas, elle n'est pas du tout cette « vieille toupie près de ses sous» comme tu dis toujours et si on
n'avait pas pris nos distances il y a trois ans, nous n'en serions sans doute pas là. Maintenant on rentre,
c'est moi qui conduis -après tout, c'est moi qui ai payé cette bagnole- et on ramène ces messieurs à
Grenoble. » Le jeune homme, bouche bée, tendit les clés à sa femme d'un geste mécanique. En marchant
vers la voiture, le jeune détective glissa à l'oreille de son collègue « On dirait que cette histoire a redonné
du mordant à la jeune dame... et puis je me demande si vous n'aviez pas raison dans votre
interprétation irrationnelle : chaque disparition du couple se fait dans un mouvement d'humeur de
l'hiver... » L'autre lui répondit avec un demi-sourire : « Si tu as compris que dans une enquête on n'avance
pas avec la seule raison, alors nous allons former une bonne équipe. »
Les portières claquèrent et la grosse voiture démarra dans un ronflement rageur.

Fin

2è lauréate :  Michèle Berthier

OFFRANDE

Mon cœur bat trop fort, il veut sortir de sa cage, s'enfuir. Une sueur glacée coule entre mes omoplates, pourtant je crève de chaud malgré l'atmosphère gelée qui m'entoure. J'arrive au bout de l'aventure. Étendu dans la neige, il attend, je vois l'œil brillant qui me guette, même, me pénètre, vrille jusqu'au fond de mon cerveau, il m'hypnotise. Je suis à lui. Il se délecte. Mon aventure, quand a-t-elle commencé ? Dans mes premiers souvenirs, il me fascinait déjà, personnage fabuleux, impressionnant de puissance, de force et d'intelligence. Parfois il était ridiculisé dans les histoires que ma mère me racontait, mais, par la suite, j'ai compris que ces contes servaient à éradiquer la peur ancestrale de cet être si supérieur à l'homme.

Il a bougé, insensiblement, sa large tête se redresse et ses oreilles pointent vers le ciel. Il est sublime de beauté et de souveraineté, régnant sur le monde animal. Une organisation de la communauté judicieuse, avec un équilibre établi entre vie collective et solitaire. Une reproduction permettant l'émergence des individus les meilleurs ainsi, la race ne peut que s'améliorer au fil du temps et de l'évolution de l'environnement. Depuis toujours, adulé, vénéré mais craint, tel un dieu il a régné sur l'humanité, alimentant la mythologie, la littérature, les arts mais aussi les peurs et fantasmes collectifs.

Bientôt il se jettera sur moi, ce sera la fin de mon aventure, comme je l'ai désiré. Je lui ai consacré mon temps et mon énergie. Toute ma vie a tourné autour du loup, mes rêves, mes études, mes choix, et maintenant ma mort. Mon corps se révolte, en désaccord avec mon aspiration, mes muscles se tendent, mes membres tremblent, ma respiration devient haletante, il veut fuir, mais, mon esprit déguste cet instant, ma fin prochaine, attendue et souhaitée, vaincu par l'être suprême. Je sentirai ses crocs acérés s'enfoncer dans la chair de mon cou, la carotide cédera sous la pression du coup de dent et le sang jaillira tachant de sombre sa robe si dense et duveteuse. Mes os seront broyés. Il me déchiquettera, mangera mon cœur et mes entrailles. Puis repus, le museau encore ensanglanté, il se reposera près de ma dépouille, digérera mon incursion en lui, il me possédera. Il traînera ma carcasse vers sa tanière pour nourrir quelques congénères. Plus tard, les charognards se battront pour ramasser mes quelques restes. Une chute de neige nettoiera la place. Je serai introuvable à jamais pour les miens, disparu dans le corps du loup. Mon désir réalisé. Fin de l'aventure, sans trace.

Je l'ai cherché, pendant des jours j'ai erré dans l'immensité sauvage, territoire hostile, cachant tant de pièges mortels qu'il m'a fallu déjouer pour parvenir à notre rencontre. La lutte contre le froid glaçant, la nuit surtout, les chutes de rochers, les traversées de forêts impénétrables, l'escalades de murailles infranchissables, l'affrontement de certains animaux sauvages à la recherche de quelques nourritures, et tant d'autres dangers imprévisibles. J'ai atteint son territoire. Il a senti ma présence, il m'a pisté. Nous ne nous quittons plus depuis trois jours et deux nuits. Jouant à cache-cache, il me repère toujours. C'est un grand loup au pelage noir luisant, il semble assez jeune, de haute stature, une allure majestueuse.

Épuisé, affamé, j'arrête, l'endroit me convient. C'est dans ce vallon paradisiaque, étincelant sous le soleil, entouré de grands bois obscurs, que notre face à face aura lieu. Le point final de ma vie, de mon aventure. Il ne m'attaquera jamais tant que je tiendrais debout, alors, je m'allonge sous le ciel lumineux, j'apprécie la couche moelleuse de neige sous mon dos fatigué, je me détends, je l'attends. Il est patient, il sait que je serai à lui. Il rêve peut-être tout comme moi.

On aurait pu se comprendre si nos mondes étaient moins hermétiques, il saurait que je l'admire, que j'aurai aimé être l'un d'eux plutôt qu'un homme. Plus j'avançais parmi les humains, plus le dégoût me gagnait. Leur société corrompue, consommant toujours plus au mépris de l'univers, ne croyant qu'à l'argent et n'espérant qu'en l'augmentation de leurs biens, leurs possessions illusoires, à l'image de leur pouvoir. Perdant toute humanité. Saccageant sans scrupule ce que la nature offrait pourtant de si sublime en qualité de vie, d'avenir et d'harmonie. Se bâfrant, s'empiffrant de produits divers et inutiles fabriqués en polluant l'espace, se gavant d'images, ne communiquant que par écrans interposés, s'enlisant dans le virtuel et perdant tout sens de l'altruisme. L'homme devenu, stupide, paresseux, égoïste et gras, s'empoisonnant lui-même ainsi que son environnement. En comparaison le loup le domine en tout point. J'ai effectué une thèse sur lui, son origine, sa vie. Un cumul d'interviews, de rencontres et de documents de spécialistes de tout poil, reconnaissent sa suprématie sur l'homme en de nombreuses questions. J'ai voulu quitter ce monde de dégénérés pour trouver celui noble et authentique du loup. Je l'ai approché en diverses expéditions, temps d'observation infini noyé dans des paysages d'une prodigieuse splendeur. J'ai aussi participé à des repérages, des comptages. Lors d'un de mes voyages d'études, nous observions les meutes, capturions certains individus pour les équiper d'émetteurs de géolocalisation. Ainsi, leur déplacements étaient suivis, puis analyser pour approfondir les savoirs sur leur mode de vie. Mais cela ne me suffit plus, je préfère périr dans le domaine grandiose des loups et par cette créature supérieure, plutôt que de vivoter parmi les hommes, pour mourir bien vieux dans un lit avec des piqûres, des tuyaux, des comprimés, nourri de bouillies et emmailloter de couches.

C'est l'heure de mon affrontement avec le loup, la confrontation, c'est lui le plus fort, il me vaincra, je l'accepte. Je lui fais don de ma vie.

Il l'a compris, le moment est venu, il grogne, il veut me communiquer quelque chose, quoi ? C'est un de mes drames ne pas pouvoir échanger avec cet être pourtant intelligent et sensible. Son grondement m'évoque celui de mon grand-père, le seul à qui j'ai expliqué mon projet, le seul à qui j'ai dit au-revoir, le seul qui comprenait ma passion, d'ailleurs il la partageait, d'un peu loin, c'est vrai. Il a toujours eu un faible pour cet animal, de là est née notre complicité, il m'a baptisé Moogli. C'est lui qui m'a emmené voir une réserve de loups lorsque j'étais enfant, puis notre voyage en Alaska dans les étendues sauvages et immaculées, territoire du loup. Le soir dans ce coin magnifique, féerique, apparaissaient leurs silhouettes majestueuses, élancées mais à la musculature puissante. Leurs longues pattes les propulsant en des courses rapides et infinies. Parfois, lors de nos escapades nocturnes, nous percevions leurs yeux phosphorescents nous observant sous la lune. Un mélange de peur et de plaisir m'envahissait et, également, la fierté d'approcher ce canidé mystique. D'autres fois, l'air vibrait du son clair, profond, magistral et ensorcelant de leur chant, j'en frissonnais et pleurais d'émotion.

Près de l'âtre, mon grand-père évoquait les histoires de croc-blanc et autres romans passionnants que j'ai dévoré par la suite. C'est grâce à lui que j'ai pu m'évader et vivre tant d'expéditions imaginaires puis réelles avec les loups, jusqu'à cette dernière aventure.

Le glapissement s'intensifie, de la bave apparaît aux coins de ses babines, les poils de sa nuque se hérissent, il me fixe implacablement de ses yeux jaunes, qu'il a l'air féroce ! Son train arrière ploie légèrement, son corps n'est plus qu'un concentré d'énergie, un gémissement aigu empli l'air, il va bondir. S'il savait comme j'espère ce moment, je le redoute aussi mais ...

Ça y est, ses pattes s'élèvent, je perçois une force extraordinaire, couché dans la poudreuse, j'ouvre la fermeture de mon anorak et j'offre mon cou.

Il s'abat sur moi, je suis cloué enfoncé dans l'épaisseur blanche. Son haleine chaude couvre mon visage.

Dans le silence de la mort, il me fixe implacablement de ses yeux dorés. J'entrevois un monde extraordinaire dans ces points éblouissants. Je vais bientôt y pénétrer. Dans cet instant d'éternité, un échange sublime s'établit entre nous. Un mélange de respect, d'admiration et d'amour. Je n'ai plus peur, je souris, il ouvre grand la gueule, ses crocs étincellent dans le soleil couchant mais, tout à coup, « pan » un coup de feu assourdissant résonne dans l'immensité.

DLV2020 affiche courtlet

 La 6è édition du festival "Des Livres&Vous" se déroulera
du 4 au 10 avril 2020 sur le thème:

"Fées sorcières et compagnie"

la date limite de dépôt des oeuvres littéraires à présenter
lors du concours "Court-lettrage" est fixée au
4 mars 2020

N'hésitez pas à prendre contact avec Luciane Brunner, volontaire en service civique sur cette mission. Vous pouvez la joindre du lundi au jeudi à l'UTL en appelant 04 92 51 38 94.

 Consulter le règlement du concours 

Le début d'une histoire

« Chaque fois qu’un enfant dit : « Je ne crois pas aux fées », il y a quelque part une petite fée qui meurt ». Il adorait cette phrase tirée du livre « Peter Pan » de James Barrie, son livre fétiche depuis tout petit. Depuis, il rêvait d’être écrivain célèbre, conteur de magie et de fantaisie. Mais pour le moment, à part le vent glacial qui s’engouffrait dans sa minuscule pièce à vivre nichée sous les toits
de Paris, il n’avait pas beaucoup avancé dans la vie. Il avait déjà plusieurs fois essayé de franchir le monde réel pour passer dans l’Autre. Il avait essayé l’opium et même l’absinthe car il avait entendu dire que cela faisait apparaître des fées vertes. Mais rien n’y faisait. Il ne pouvait s’empêcher de penser qu’à sa naissance ce n’était sûrement pas des fées qui s’étaient penchées sur son berceau
mais plutôt des trolls véreux et pernicieux...
À trop penser à sa pauvre vie désastreuse, il n’avait pas prêté attention aux grosses gouttes de pluie qui commençaient à transpercer sauvagement le toit que lui servait de refuge. Son livre préféré se retrouva trempé en quelques secondes ; trop tard pour le sauver. L’encre avait coulée et le livre était gorgé d’eau. De rage, il l’envoya s’écraser contre le mur et toutes les feuilles volèrent dans la pièce.
Cette fois, s’en était trop. Le poids de ces dernières années laborieuses et solitaires l’écrasait. Il se recroquevilla dans un coin de la pièce et se mit à pleurer. Ses larmes tombèrent sur des pages volantes devenues papier mâché. Soudain, les lettres se mirent à scintiller. Il ferma les yeux, pensant à une hallucination. Cependant, lorsqu’il les rouvrit il n’était plus dans sa chambre. Il était assis par terre, au pied d’un majestueux saule pleureur. L’herbe sous ses pieds était soyeuse, d’un vert
éclatant, tout comme la couleur des fleurs, des arbres et du ciel atour de lui.
Il lui semblait qu’il était dans un rêve tellement tout était beau et féerique...
Soudain, il sursauta. Il n’avait pas vu les deux petites créatures qui lui faisaient face. L’une était une sorte de petit troll grassouillet avec un gros nez rond et des yeux globuleux. L’autre était une jolie fée, ondulant l’air avec ses petites ailes dorées qui faisaient danser ses cheveux acajou. Tous deux lui arrivaient à peine aux genoux mais ne semblaient pas effrayés. Au contraire, ils le contemplait en
souriant. Lui-même, et malgré le fait de de ne pas savoir où il se trouvait n’éprouvait bizarrement
pas la moindre peur...
Le troll prit la parole le premier :
- Alors c’est lui le morveux qui pense qu’on est véreux ?
- Morveux ? Excusez-moi...monsieur tenta-t-il, j’ai bientôt trente ans !
Les deux créatures éclatèrent de rire. La fée, qui avait une jolie couronne de fleurs sur la tête parla d’une voix douce :
- Tu en as mis du temps pour venir. Ne pleures-tu donc jamais ?
Pleurer ? Pourquoi diable cette fée sortie de nulle part lui demandait-il s’il pleurait ? Il se gratta la tête, se pinça, s’écarquilla nerveusement les yeux pensant être en train de rêver. Rien n’y fit.
- Que... quoi ? Mais qui êtes-vous ? Et où suis-je ?
Le paysage avait beau être féerique, la situation commençait à l’agacer.
Les deux créatures se rapprochèrent : « Il n’est pas très futé » entendit-il dire le troll à la fée.
Elle prit à nouveau la parole :
- Tu es un... messager. Comment crois-tu que les contes de fées ont-ils pris vie dans votre monde ? Penses-tu vraiment que cela sort de l’imagination des humains?  Non, c’est nous qui choisissons quelles histoires sont racontées dans vos livres, et qui les écrira. Si vous les élus, êtes assez sensibles pour pleurer un jour, vos larmes vous amènent ici. Elle deviennent magiques. Votre sensibilité et votre croyance, c’est votre épreuve pour arriver jusqu’à nous. Certains ont échoué. Toi
tu as mis... un peu de temps, dit-elle dans un clin d’œil.
- Alors, je suis vraiment digne de devenir écrivain ?
Son cœur s’allégea. La situation le dépassait et pourtant au fond de lui, quoique cela puisse être, il sentait qu’elle disait la vérité et que c’était son destin d’écrire un jour.
- Bien sûr ! D’où penses-tu que vient cette obsession pour notre monde ? Nous t’avons choisis dès la naissance. Ton destin est d’écrire nos aventures, nous te donnons seulement un petit coup de pouce. Si le peuple humain ne croit plus en nous, nous cesserons d’exister...
Cette dernière phrase lui rappelait celle de son livre préféré. L’auteur de ce dernier s’était t’il déjà tenu ici avant d’écrire « Peter Pan » ? En son for intérieur il en était persuadé alors il décida de garder cette pensée positive pour lui . La fée, imperturbable, continuait de parler :
- Pour survivre, il nous faut sauvegarder l’imaginaire et le rêve chez les humains. En retour, votre vie est remplie de féerie. Nos deux mondes s’entraident à mieux vivre... mais cela doit rester secret.
- Mais comment pourrais-je écrire sur vous si je dois garder ça secret ?
Les deux créatures se regardèrent, puis la fée claqua des doigts et brusquement, il s’endormit. Lorsqu’il rouvrit les yeux, il était de nouveau dans sa pièce miteuse, sous les toits de Paris. Il avait l’impression d’avoir dormi des heures, mais d’avoir fait un joli rêve. Le soleil avait reparu, il pouvait sentir sa douce chaleur à travers les tuiles pleines de trous et de mousse. Ses yeux se posèrent sur son livre favori. Bizarre. Il était sûr que ce dernier était tombé en friche lors du violent orage. Mais quand avait eu lieu cet orage ? Et comment son livre pouvait-il être intact ?
Il avait du mal à se remémorer les dernières heures. Le livre semblait différent . Il le prit dans ses mains et soudain son cœur s’accéléra. Il y avait toujours la même image féerique imprimée sur la couverture mais le tire avait changé. Il pouvait désormais y lire :
« Tome I : Chroniques & aventures du peuple de Lumis », par Thomas Kurt.
Il avait écrit son premier livre. Enfin... presque !

texte écrit par 21.CCL.Anonyme21

afficheCourtLettrage3

Le thème choisi :

«  RETENIR L'ÉPHÉMÈRE ».

semble avoir inspiré beaucoup d’entre vous et nous offre la joie de lire vos textes.

Les textes sont consultables ICI.

Dès la délibération du jury effectuée, le palmarès sera publié ICI

 

MERCI à tous les participants

Assise dans mon fauteuil, seule dans ma chambre, coincée dans ce corps trop encombrant, je n'en
peux plus, je vais hurler, je veux sortir, m'évader, m'enfuir, vivre.
Mais aucun son ne sort de ma bouche, sinon, j 'aurai droit à une piqûre calmante qui m'abrutira
pendant trois jours. Je deviendrai ainsi un corps mou, inerte et baveux.
J'essaie de me lever pour aller à la fenêtre, au moins prendre un peu d'air pur, admirer le cerisier
habillé de ses fleurettes roses si légères et odorantes, écouter les oiseaux piailler entre ses branches,
être dans la vie, quoi
Mes jambes ne m'obéissent plus, si j 'insiste je me retrouverai par terre, quelques heures sur le
plancher avant que l'infirmière ne me découvre. On me fera la morale, et on m'attachera sur mon
siège, dans mon intérêt, comme ils disent !
Mon désir de m'évader du quotidien monotone, n'est pas nouveau. J'ai toujours eu mes stratégies.
Déjà en classe, lorsque l'enseignant égrainait sa leçon imbuvable, mon esprit voltigeait à mille lieu
hors de la classe, et ainsi, je quittais le cours, détendue et heureuse. Une autre méthode qui m'a bien
réussi, c'est l'occupation manuelle. C'est dingue comme se consacrer au dessin, au tricot, à la
cuisine ou même passer l'aspirateur, absorbe l'esprit. Concentrée sur la tâche, l'ennui disparaît,
mais l'énergie absorbée par l'action limite celle de l'échappée qui reste médiocre.
De toute façon, je ne peux guère faire grand-chose de mes dix doigts, maintenant, à part provoquer
une catastrophe. Je renverse mon verre une fois sur deux en tentant de le saisir, et parfois, en
prenant ma fourchette, mon assiette s'écrase au sol sans que j'en saisisse vraiment la cause.
Ma fuite préférée, c'est la lecture, je m'évade dans le texte, je suis le personnage concerné, j' évolue
dans sa contrée et à son époque. Je vis un nombre incalculable d'aventures passionnantes, amasse
une multitude de connaissances générales et gagne certaines réflexions.
Le livre est une fenêtre ouverte sur l'au-delà de ma vie.
Mais maintenant, mes yeux sont trop fatigués pour dévorer quelques pages d'écriture.
La télévision reste ma seule distraction accessible. Je passe le temps vautrée dans mon fauteuil,
l'oeil rivé sur un écran à avaler des images sonores. Cela me fatigue, m'abrutit, je ne fixe guère
d'idées intéressantes et n'adhère à aucune histoire malgré le nombre impressionnant de séries qui
défilent.
Il me reste le rêve, je m'évade en pensée. J'appelle les souvenirs, je dois m'en méfier. Certains sont
explosifs, trop heureux. C'est douloureux à l'extrême. Je voudrais tant revivre un instant ces
moments de bonheurs entourée de personnes disparues. Il y a ceux que j'ai gravés dans un coin de
mon cerveau pour toujours, pour les apprécier plus tard. Mais ce plus tard devient trop tard. Ils sont
floutés par mes larmes qui coulent abondamment, les visages effacés par le temps, et le vécu
estompé par l'usure. Heureusement, il m'en reste certains que je peux aborder sans crainte. Encore

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